Article de Libération
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Lyon se transporte avec douceur
Catherine COROLLER 22 septembre 2013 à 18:06
Autopartage, location de vélo, métro… la troisième ville de France cherche à réduire la place de la voiture. Un objectif encore en devenir.
Lyon met le turbo sur les modes de déplacements «doux» et non polluants.
En quelques semaines, Gérard Collomb, maire PS de la ville et président du Grand Lyon (la communauté urbaine), a inauguré deux systèmes d’autopartage utilisant des voitures électriques et une balade pédestre de 15 kilomètres le long de la Saône. Devraient suivre prochainemen, le prolongement d’une ligne de métro et de deux lignes de tramway, ainsi que la mise en service d’un tunnel et de trois ponts réservés aux modes de déplacements «doux». Les médisants prêtent à Gérard Collomb des arrière-pensées politiques à quelques mois des élections municipales de 2014 où il vise un troisième mandat. «On a bossé pendant six ans sur ces projets, et tout arrive en entonnoir», proteste Gilles Vesco, adjoint à la nouvelle mobilité de la municipalité lyonnaise.
Libre-service. La troisième ville de France a longtemps été le royaume de la voiture. Mais à la fin des années 70, une nouvelle vision de l’organisation des déplacements commence à apparaître à Lyon comme ailleurs. En 1978, les deux premières lignes de métro, qui en compte quatre aujourd’hui, sont inaugurées. A partir de 2001, c’est au tour du tramway qui est désormais le premier réseau de France. Puis, en 2005, de Vélo’v, système de location de vélos en libre-service. Afin d’inciter les usagers à optimiser leurs trajets en combinant les transports en commun et la bicyclette, la carte d’abonnement aux TCL (transports en commun lyonnais) permet d’utiliser le service Vélo’v. Résultat : à en croire Gilles Vesco, le milliard d’euro investi par le Syndicat mixte des transports pour le Rhône et l’agglomération lyonnaise (Sytral) pour l’extension du réseau de transports en commun et les 90 millions d’euros du «plan modes doux» sur la même période ne l’ont pas été en vain : «Le mixte modal a fait baisser le trafic automobile de 20% dans Lyon intra-muros pendant les dix dernières années, et devrait le faire baisser de 20% encore dans les dix ans qui viennent», assure l’élu.
Malgré ces résultats, le taux de motorisation des ménages lyonnais demeure élevé puisqu’il est encore de 72% contre 53% pour les Parisiens. Par ailleurs, la baisse du trafic automobile dans la capitale s’étant accompagnée d’une explosion du nombre des deux-roues motorisés, le même phénomène ne risque-t-il pas de se produire à Lyon ? Gilles Vesco assure que non. Selon lui, le lancement de Vélo’v l’en aurait «protégé».
Alors Lyon, paradis des déplacements non polluants ? On en est encore loin. Jean Murard, le président de l’association Déplacements citoyens, se dit globalement satisfait des efforts de la communauté urbaine pour améliorer la desserte. Mais il s’inquiète de deux projets : la construction du contournement autoroutier de l’agglomération par l’ouest qui engloutirait des milliards d’euros d’argent public, et les investissements du Sytral pour la desserte du futur grand stade de l’Olympique lyonnais, dans la grande banlieue de Lyon.
Les défenseurs du vélo de l’association Pignon sur rue ont également des critiques à formuler. Malgré les multiples aménagements inaugurés cette rentrée, Sophie Girard-Blanc dénonce «un manque de volonté politique». «On est en train de se faire doubler par Bordeaux», signale-t-elle. Et de pointer le «morcellement des pistes cyclables» qui s’interrompent au passage des carrefours et de certains ponts, l’absence de jalonnement du réseau cyclable dans Lyon et son agglomération, ou les aménagements «a minima» de contresens cyclables alors que loi prévoyait leur généralisation dans les zones 30.
Pollution. Les efforts de la communauté urbaine pour promouvoir les modes doux rendent furieux Claude Polidori, le président de l’Automobile Club du Rhône : «C’est haro sur la voiture. On a l’impression qu’on ne veut plus de nous dans Lyon.» En attendant, les efforts du Grand Lyon pour limiter la pollution automobile ont un impact réel sur la qualité de l’air. «Sur les dix dernières années, elle a tendance à s’améliorer de façon globale sur la région, y compris sur l’agglomération de Lyon», indique Manuel Marquis, directeur territorial zone ouest à Air Rhône-Alpes. Pour autant, « il y a encore des dépassements des normes européennes qui subsistent», reconnaît-t-il.
Car Lyon est traversé en son cœur, par une autoroute urbaine, l’A7. Son déplacement a été maintes fois évoqué, mais la solution dépend, cette fois, de l’Etat et non du Grand Lyon. Et en période de vaches maigres, le coût d’une telle opération est jugé prohibitif.
Catherine COROLLER
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